J’ai été invitée à présenter le rôle des organisations de producteurs devant le certificat de spécialisation lait proposé par le CFPPA de Laval. Je tiens tout d’abord à remercier les jeunes et le centre de formation pour leur accueil.

Difficile de faire comprendre que nous sommes entrés dans une nouvelle ère :

  • Le producteur de lait est un chef d’entreprise

«  Le métier de producteur de lait que vous envisagez, ne se cantonne plus à la traite et aux heures de tracteurs. Il faut que vous vous intéressiez à comment va être commercialisé votre lait. Il faut vous ouvrir à l’extérieur et sortir de votre ferme. Vous deviendrez des chefs d’entreprise, ne l’oublier jamais »

  • Qu’est-ce qu’une OP, une AOP ?

Nous avons donc échangé sur le rôle des OP, sur le rôle des AOP. Je leur ai présenté l’OP Perreault adhérente à l’AOP Sunlait. Nous avons avec Perreault un historique de groupement depuis 1962, donc de discussions avec notre acheteur de lait. Par contre la formation de l’AOP Sunlait est issue de la rencontre des différentes OP verticales livrant Savencia. Il nous a fallu apprendre à nous connaitre et apprendre à travailler ensemble avec parfois près d’un millier de kms entre nous. C’est une ouverture enrichissante sur le paysage laitier français.

Étonnant pour eux de penser que les producteurs peuvent travailler en commun sur des sujets tel que :Le juridique (écritures à modifier dans les contrats),

-L’économique (comprendre comment est calculé le prix du lait mais aussi comment valoriser notre façon de travailler),

-La négociation (apprendre à discuter avec notre partenaire acheteur en direct au nom des 2600 exploitations),

-La communication (se réapproprier notre image)

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  • Pourquoi ai-je intérêt d’adhérer ?

Une nouveauté pour eux de se dire que oui, nous les producteurs de lai, ensemble nous pouvons devenir maîtres de notre destin. Avec 400 000 litres qu’est-ce que je représente à l’échelle de ma région ? Pas grand-chose mais à 2600 producteurs et 1,2 milliards de litres sur tout le territoire français on peut agir. Pour cela il faut que chacun se sente responsable. Pensez-vous qu’après 20 ans d’activité, je peux avoir les mêmes objectifs que vous qui allez démarrer votre vie professionnelle ? Engagez-vous. Qu’est-ce que une demi-journée par trimestre donnée pour un conseil d’administration d’OP  si vous pouvez œuvrer pour assurer la vie économique de l’entreprise que vous allez gérer ?

  • Les changements

Alors, bien sur l’ère des quotas semble ne pas être complètement oubliée :

 Pourquoi mutualiser les volumes ? Pour que certains dépassent allègrement sans être pénalisé ?  Non, pour te permettre d’être maitre de tes choix dans la manière de gérer ton troupeau : il y a des pourcentages de production à respecter dans ton contrat certains souhaitent plutôt faire du lait à l’herbe, d’autres grouper les vêlages sur 2 ou 3 mois, d’autres aussi étalent leurs vêlages sur l’année et bien ensemble nous respectons le contrat.

  • Les OP et le syndicalisme

Une question leur a semblé difficile à poser c’est le rôle du syndicalisme dans les OP. Pour moi, nous sommes partenaires dans la défense des producteurs. Effectivement, ce sont les OP qui ont désormais le pouvoir de négocier le prix du lait avec l’acheteur. Le syndicalisme est un choix personnel qui se respecte mais qui n’est pas un préalable à l’adhésion à une OP. L’un n’empêche pas l’autre.

Merci au CFPPA de Laval de m’avoir permis d’expliquer à ces étudiants en certificat de spécialisation lait, futurs producteurs de lait le rôle du collectif des OP .

Merci aux jeunes pour leur intérêt apporté à mes propos. J’espère que je leur aurai donné l’envie d’être acteur de leurs projets futurs.

Marie-Laure Bechepois, OP Perreault 

Huit des OP adhérentes à SUNLAIT ont effectué leurs Assemblées Générales entre février et mars 2017. Une constante s’y est déroulée : l’interpellation des responsables achat lait de Savencia sur la situation catastrophique dans laquelle se trouvent les adhérents SUNLAIT. Ces adhérents ont maintes fois demandé un geste fort de l’entreprise en terme de revalorisation du prix base dès le T2 et pour toute l’année 2017. Chacun s’est appuyé sur sa situation locale pour demander que la pérennité de la filière lait française commence par une meilleure santé financière des exploitations laitières.

C’est sur cette base de demandes réitérées par les producteurs que le CA sunlait a mandaté le groupe négo à demander au groupe savencia lors de la rencontre du 21 mars une revalorisation immédiate dès le T2 du prix de base du lait payé aux producteurs et ainsi attendre 350€ de moyenne sur l’année 2017, prix minimum nécessaire à la survie des entreprises des adhérents SUNLAIT.

Face à eux, ils ont  trouvé des représentants de Savencia totalement fermés à toute discussion et se réfugiant derrière l’argument du Marché.

Nous ne pouvons que profondément déplorer l’attitude dont ont fait preuve les représentants de Savencia mardi dernier.

Nous voulons construire une vraie relation de transparence, de responsabilité et d’engagement de la part de SAVENCIA pour un partenariat gagnant/gagnant!

Lettre ouverte adressée à Monsieur Alex Bongrain,

Président du Conseil d’Administration du Groupe Savencia, Fromage & Dairy

Monsieur le Président Bongrain,

Vous représentez le groupe Savencia auquel nous sommes fiers de livrer notre lait pour que vous le transformiez en fromages connus et appréciés des consommateurs (Tartare, Saint Moret, Caprice des Dieux, Saint Albray, Le Rustique, etc.). Comme vous le savez, nous mettons à profit notre savoir-faire 7 jours sur 7, 365 jours par an, pour produire un lait de qualité afin que vous puissiez continuer à satisfaire les amateurs de fromages.

Ce travail mérite une rémunération décente et nous n’avons cessé de présenter le chiffre minimal qui est aujourd’hui nécessaire à la survie de nos exploitations comme à la pérennité de la filière. Ce prix de base, vous le connaissez, il est de 350 € au minimum par 1.000 litres de lait. A l’occasion du Salon de l’Agriculture nous avons lancé une campagne de communication positive pour sensibiliser les consommateurs. Nous les avons incités à acheter vos marques pour nous soutenir. Leur achat devient alors responsable et ils vous demandent en contrepartie de leur acte citoyen, d’acheter notre lait au juste prix en reconnaissance de notre travail.

Cette campagne, maintenant relayée sur Internet a été très bien accueillie par les visiteurs, du Salon, par la presse et plus largement par les consommateurs. Plusieurs milliers de soutiens ont signé notre campagne sur le terrain et en ligne, parmi lesquels des hommes politiques, de simples consommateurs, des collaborateurs de votre Groupe et d’autres acteurs du monde agricole.

Fiers de contribuer à la réussite de votre Groupe, nous souhaitons pouvoir continuer à vivre de notre métier. Il faut donc que votre Groupe paye notre lait à la mesure de notre travail, de nos efforts et de la valeur qu’ils génèrent. Monsieur le Président Bongrain, nous vous demandons aujourd’hui de nous acheter notre lait à un prix de base décent, d’au moins 35 centimes le litre, pour nous permettre de couvrir nos coûts de production et de dégager un revenu minimum chaque mois.

Aujourd’hui, grâce à notre travail et celui de vos employés, vous affichez un résultat net de plus de 122 millions d’euros, soit une progression de plus de 86% depuis l’an dernier. C’est donc soutenus par l’opinion publique et par vos clients que nous attendons de votre part une augmentation décente du prix d’achat de notre lait.

Par son Conseil d’Administration et représentés par son Président, les 2600 producteurs de l’AOP Sunlait. 

Les producteurs de lait qui n’ont pas reçu de courrier de France Agrimer au 31 décembre 2016 dans le cadre de la procédure simplifiée, peuvent déposer une demande d’aide auprès de leur DDT(M) jusqu’au 28 février 2017.

Attention: seules les OP peuvent délivrer une attestation.

Comment cela va se passer ?

Les demandes d’aide doivent être effectuées à partir de l’imprimé Cerfa n°15653*01, disponible sur le site de FranceAgriMer (http://www.franceagrimer.fr/filiere-lait), qui doit être transmis avec les pièces justificatives nécessaires, aux DDTM concernées dès lors que les conditions suivantes sont remplies :

  • avoir livré du lait de vache à un acheteur, sans quantité minimale au mois de juillet 2016. Pour les nouveaux producteurs installés en production laitière après juillet 2016 et jusqu’au 31 décembre 2016 : justifier de livraisons de lait de vache après leur installation.
  • être répertorié au répertoire SIREN de l’INSEE par un numéro SIRET actif au moment du dépôt du dossier (de demande et de paiement),
  • ne pas être concerné par une procédure de liquidation judiciaire.

Le dossier sera examiné au regard de deux critères d’éligibilité :

  • Critère 1 : présenter une baisse d’EBE supérieure ou égale à 20%. Les nouveaux producteurs laitiers installés, avec ou sans aides, en 2015 et 2016 (donc installés depuis le début de la crise) en individuel ou en société sont exonérés du respect du critère 1.
  • Critère 2 : (un des quatre critères doit être justifié) :

–  être adhérent d’une OP reconnue ou d’une coopérative en juillet 2016 ou au plus tard au moment de la demande d’aide ou,

– justifier d’une démarche visant à développer l’autonomie fourragère de l’exploitation ou,

– disposer au 01/10/2016 de 30 vaches mixtes ou laitières au plus avec l’application de la transparence des GAEC ou,

– avoir stabilisé ou réduit la production de lait de vache sur la période de janvier à octobre 2016 par rapport à la même période de 2015, sur la base des volumes livrés à des acheteurs. Pour les nouveaux producteurs de lait, des dispositions spécifiques s’appliquent.

 

Historiquement les fermiers ont toujours payé leur fermage en quintaux de blé et kilos de bœufs, puis en monnaie sonnante et trébuchante sur la base des cours de ces deux produits. Les indices n’existent que depuis 1996.Mais jamais on a parlé du lait dans ces transactions.

Si nos arrières grands-mères étaient encore de ce monde, elles nous diraient la vérité sur cette production : le lait c’était l’économie de la maison. Il fallait traire à la main et transformer ce lait pour le conserver, soit en fromage pour améliorer la soupe quotidienne ou pour emporter avec un morceau de pain pour le repas à l’école ou au champ. Soit en  beurre pour en vendre quelques kilos sur le marché. Les quelques sous récoltés servaient à acheter ce qu’on ne pouvait produire  dans les jardins (sucre, café) mais aussi acheter du tissu, des boutons, du fil.

« Les sous du lait c’est pour faire tourner la maison pas un de plus ! » disaient les hommes dans les fermes depuis toujours et jusqu’à la 2nde guerre mondiale.

Ce n’est qu’entre deux guerres que des hommes ont commencé à faire le tour des fermes pour collecter les excédents de lait et reprendre les recettes ancestrales des femmes pour les industrialiser, les adapter à une société de consommation.

On a alors perdu, dans nos fermes, le savoir-faire ancestral des femmes et nous avons laissé s’en aller la plus-value qui avait été créée depuis des siècles.

Evidemment, il fallait rentabiliser la collecte et c’est ainsi que cette production laitière est devenue dans un certain nombre de ferme, la production principale. Mais historiquement, la traite est restée longtemps un travail de femme. Est-ce pour cette raison que cette matière première qu’est le lait ne doit pas avoir de valeur ?

Rappelons-nous que jusqu’à la 2nde guerre mondiale, la mortalité infantile était de 70/1000 naissances par an. L’amélioration de la nutrition par l’apport de lait de vache, cumulée aux efforts d’hygiène et de médecine ont permis de baisser ce taux à 3/1000 aujourd’hui. Rappelons-nous  que nos grands-parents citadins prenaient les transports pour faire le plein de provisions alimentaires dans les fermes pendant la guerre : ils avaient faim !!

Alors Messieurs les industriels et transformateurs laitiers, n’oubliez pas que le maillon essentiel de vos fabrications c’est le LAIT. Ce lait a une valeur de travail quel que soit le pays où il est produit. Quand vous nous rétorquez que c’est le marché mondial qui décide le prix payé aux producteurs, moi je vous affirme que tous les producteurs de lait au monde vendent à perte.

Qui a le droit de vendre à perte ?

Que deviendront vos usines quand il n’y aura plus de lait produit pour les approvisionner ?

N’êtes-vous pas en train de scier la branche sur laquelle vous êtes assis ?

Marie-Laure Bêchepois, 

Présidente de l’OP Perreault et chargée de communication AOP Sunlait